Royal Secrets – Présentation & Interview – FunnyFox
Royal Secrets
Un jeu de Vincent Bernet
Illustré par Alain Boyer
Edité par Funny Fox
3 à 5 joueurs / 10 ans et + / 35 minutes
Ami.e. lectrice, Ami lecteur, aujourd’hui est un jour un peu particulier. En effet, j’ai eu le grand plaisir de recevoir par l’éditeur FunnyFox le jeu « Royal Secrets ». Il s’agit d’un jeu que l’auteur, Vincent Bernet, m’avait présenté sous forme de prototype il y a un peu plus de 2 ans dans un bar à jeux (vivement leur réouverture !). En fait, Vincent comme moi, faisons partie d’un groupement d’auteurs (la L.E.A.F.) qui échangeons régulièrement nos avis sur les prototypes des uns et des autres. Ceci permet d’affiner les mécaniques de nos jeux, de trouver de nouvelles idées… bref, d’avancer !
C’est pourquoi cet article sera un peu particulier. En effet, dans un premier temps, je vous présenterai la thématique ainsi que la mécanique de Royal Secrets. Puis, dans un deuxième temps, vous pourrez lire l’entretien (passionnant, j’ose le dire !) que nous a accordé Vincent pour tout savoir de la genèse de son prototype jusqu’à l’édition actuelle.
Comment joue-t-on à Royal Secrets ?
Au service de Sa Majesté
Dans Royal Secret, les joueurs incarnent des espions cherchant à influencer les décisions royales en faveur de leur pays. A vous d’envoyer vos courtisans et autres valets aux audiences du Roi et de la Reine afin de remporter la victoire en cumulant le plus de points au bout des 7 manches que compte le jeu.
Chacune des manches se déroule ainsi :
Tout d’abord, on révèle 2 cartes « Audience » : une à remporter auprès du Roi et une autre à récupérer auprès de la Reine. Sur ces cartes figurent :
– Une valeur d’influence minimum pour réussir l’audience,
– Le nombre de Points de victoire à gagner (en cas d’audience réussie) ou à perdre (en cas d’audience ratée),
– Une faveur qui accordera un avantage au joueur qui emportera la carte.
Ensuite, chaque joueur place sa figurine sur l’une des deux audiences (le Roi ou la Reine pour tenter de remporter la carte « Audience » associée). Petite subtilité : il n’y a pas de tour de jeu « horaire ». En effet, lorsqu’un joueur réalise une action, il désigne un autre joueur qui réalisera cette même action parmi ceux n’ayant pas encore joué. Cette petite subtilité peut avoir un véritable impact pour tenter de déceler les bluffs éventuels des autres joueurs.
Après cela, chacun va poser une carte « Courtisan » ou « Valet » (ayant chacune une valeur d’influence) face cachée ou face visible. Puis un chacun ajoute une 2ème carte à sa mise en la posant obligatoirement dans sur la face opposée de sa 1ère carte. Ainsi, chaque joueur aura posé une carte face visible et une autre face cachée.
Royal Secrets
Pour qu’une audience soit un succès, il faut que les cartes jouées par l’ensemble des joueurs soient au moins égales à la valeur de la carte Audience.
En cas de succès : Les joueurs ayant participé à l’audience remportent tous les points de victoire inscrits sur la carte influence quelque soit leur mise. Ils les rangent dans leur petite écritoire afin que ceux-ci restent cachés. Le joueur ayant misé la plus grosse valeur avec ces 2 cartes remporte la carte Audience. Il la place devant lui et pourra l’utiliser lors d’une prochaine manche au moment qu’il jugera opportun.
En cas d’échec : Si la somme de l’ensemble des valeurs jouées par les participants est inférieure à l’influence requise, tous les participants perdent l’équivalent des Points de victoire figurant sur la carte Audience.
Si un joueur se retrouve seul à une audience, il devra tout de même faire face au Cardinal qui posera 2 cartes au hasard dans le calcul des points d’Audience.
Dans tous les cas une nouvelle manche débute.
Le jeu présente également d’autres subtilités comme la carte « Excuse » permettant de quitter une audience et de laisser les autres joueurs dans l’embarras ou les cartes Valet pouvant vous mettre à l’amende… sans compter bien évident les différents pouvoirs des faveurs accordées par les cartes Audience.
L’avis de BDPhilou sur Royal Secrets
Vous l’aurez compris, Royal Secrets est un jeu de bluff rapide et assez subtil. Bien malin celui qui misera le moins possible mais fera tout de même parti des heureux bénéficiaires des points de victoire de la manche. A l’inverse, miser gros pour espérer remporter la carte Audience et son précieux bonus pourra se révéler un bon calcul… sauf si quelqu’un vous la souffle grâce à une mise encore plus conséquente. C’est vraiment cela qui m’a plu dans ce jeu : tout est prise de risque !
Je mise peu et je croise les doigts pour que les autres ne fassent pas de même ou je mise gros mais j’espère que personne n’en fera autant. De cela découle un jeu fluide et réellement amusant pour qui aime les jeux de bluff ou de prise de risque. Sans compter que le matériel a fait l’objet d’une attention toute particulière de la part de FunnyFox entre les meeples joliment sculptés, les écritoires en 3D et les illustrations d’Alain Boyer donnant un cachet franchement rafraichissant à l’ensemble.
Royal Secrets Interview de Vincent Bernet
Le Carnet des Geekeries 16 janvier 2021
1. Peux-tu nous parler un peu de la genèse de ton jeu « Royal Secrets », lorsqu’il s’intitulait encore « Basse-Cour » ? Comment l’idée de la mécanique centrale et de la thématique te sont venues ?
Vincent Bernet : L’impulsion de départ était de créer un jeu à partager avec mes deux jeunes enfants. J’ai commencé à développer un dungeon crawler (exploration de donjon) avec un matériel minimaliste, composé de cartes uniquement. Je porte beaucoup d’importance aux gestes qu’on déclenche quand on joue. Je voulais qu’on abatte une carte comme on porte un coup ou lance un sort. Le noyau dur de la mécanique est venu très vite, et s’est imposé jusqu’à la fin.
Concernant les sensations de jeu, Je voulais que “les joueurs soient à la fois coéquipiers et en même temps adversaires”. Ce paradoxe apparent m’a guidé jusqu’au bout. Plus précisément, l’enjeu pour le joueur est de battre les autres, mais il ne peut y arriver qu’en coopérant avec eux. Un jeu “coopétitif” ^^. Très vite, les mécaniques de bluff et de trahison qu’impliquait cette expérience de jeu m’ont naturellement poussé à changer la thématique et la cible des joueurs (au revoir les cœurs purs, bonjour les fourbasses!).
Mon goût pour l’histoire m’a naturellement porté vers la cour française du 17eme siècle et ses intrigues. La première fois que j’ai présenté le proto, (spéciale dédicaces aux amis François Gandon et Mathieu Bossu qui s’y sont collés) le roi, la reine et les courtisans étaient en place. En revanche, la mécanique nécessitait énormément de réglages. Il fallait épurer, enlever ce qui chargeait en complexité, resserrer autour de ce qui amenait de la tension. Dans ce sens, François a apporté sa touche avec le système de mise que j’adore : une carte visible, l’autre cachée.
2. A propos de la thématique, lorsque tu m’avais présenté le prototype de ton jeu il y a 2 ans, celle-ci était déjà basée sur des courtisans et des monarques. C’est rare qu’un prototype conserve son thème lors de sa version commerciale. D’autres thèmes ont-ils été envisagés avec ton éditeur Funny Fox ? Tenais-tu particulièrement à ce thème ?
V.B. : En effet je tenais énormément au thème. La thématique des jeux est un aspect que j’aime particulièrement travailler, mais je suis toujours ouvert à en changer. Sur Royal Secrets la thématique et la mécanique étaient à mon sens fusionnelles. Quand j’expliquais un point de règle, le storytelling venait toujours naturellement en support. Les mécaniques s’imbriquaient avec logique dans l’histoire qu’on racontait, ce qui est hyper agréable pour un joueur. Dès les premiers échanges avec Marine de FunnyFox, il me semble que la thématique a été validée. Elle souhaitait toutefois la tester auprès de futurs clients, à savoir des éditeurs étrangers. Si la thématique fut maintenue, c’est à l’intérieur de celle-ci que sont intervenus quelques changements.
Évidemment, j’étais assez triste de faire une croix sur une partie du storytelling que j’avais construit et à laquelle j’étais attaché, mais j’ai fait confiance aux équipes de FunnyFox qui ont apporté énormément au jeu par leurs compétences et leur professionnalisme. Marine a été une source de propositions géniale.
3. En 2019, tu remportes le prestigieux Prix « Jeux de Demain catégorie Famille » du concours de prototypes de jeux de société de Paris est Ludique. Quelle a été ta réaction au moment de la révélation du résultat du jury ?
V.B. : Ah la la quel moment ! Je n’ai que très peu d’expérience de participation aux festivals ludiques. Mais PEL 2019 était très spécial. Tu te souviens de cette canicule ? 100° sous les barnums, 36 heures de jeu à enchaîner les parties, 2 heures de sommeil au milieu. Mais j’étais porté par une énergie rare. J’étais entouré de nos camarades de la LEAF (le groupe d’auteur(e)s d’Île de France) qui m’avaient de près ou de loin accompagnés dans cette aventure. Et ce qui se passait autour de la table était génial.
Le courant passait vraiment bien entre les joueurs, l’ambiance “Basse Cour” marchait vraiment bien. À l’annonce du résultat je me souviens avoir bondi comme un gamin (je reste encore un peu perché). J’en profite pour saluer les organisateurs du PEL qui nous offrent cette formidable opportunité pour nos protos.
4. Ce prix a-t-il été un accélérateur pour rencontrer ton éditeur FunnyFox ? Comment se sont déroulés vos premiers contacts ?
V.B. : Je n’avais montré le proto à aucun éditeur avant d’arriver au Fesitval Paris Est Ludique. J’ai rencontré Marine de FunnyFox directement au cours des sessions de jeu du PEL. Le courant est tout de suite bien passé. J’imagine que le prix qui a clôturé la journée a aidé. En tout cas, tout est allé très vite ensuite. Si j’ai été contacté par d’autres éditeurs, je n’ai pas eu beaucoup d’hésitation quant au choix de FunnyFox comme éditeur, pourtant complètement nouveau sur le marché à l’époque. Le développement du jeu a été très agréable. J’avais énormément bossé le proto avant de le présenter à un éditeur, enchaîné les versions du jeu et les sessions de tests.
Le jeu tournait vraiment bien et pourtant je savais que le travail n’était pas terminé. Il restait un certain nombre de petits détails qui ne me satisfaisaient pas complètement. Il était hors de question de laisser des petits trucs sous le tapis en se disant, « ça va passer”. Et là-dessus la collaboration avec FunnyFox a été géniale. On peut se dire qu’un jeu n’est jamais parfait ou terminé, mais il y a un moment où j’ai senti que chaque point de règle avait sa place, et conduisait à la tension qu’on avait imaginé au départ. Le “coopétitif” pouvait s’exprimer dans chaque action.
5. Lorsque j’ai ouvert la boîte de « Royal Secrets » pour la première fois, j’avoue avoir été immédiatement séduit par le matériel et notamment les illustrations magnifiques d’Alain Boyer. As-tu participé au choix du style graphique ? Quelle a été ta réaction en découvrant les premiers visuels de ton jeu ?
V.B. : Les illustrations d’Alain Boyer sont excellentes. J’étais hyper enthousiaste en les découvrant, d’autant que c’est une étape qui concrétise vraiment l’existence du jeu. Nous avions discuté en amont avec Marine du style graphique. Étant graphiste, j’étais tenté de mettre mon grain de sel et j’avais une idée très précise de ce que je souhaitais. J’ai donc partagé mon point de vue, mais j’ai décidé de leur faire complètement confiance sur la suite. L’édition c’est leur métier, ils le connaissent bien mieux que moi. Alain Boyer a beaucoup apporté au projet et l’a amené vers une cible plus large. J’ai trouvé génial l’apport des écritoires qui servent à cacher les gains des joueurs.
Ils ont remplacé brillamment mes paravents qui passaient leur temps à se renverser, et animent vraiment le plateau de jeu. Tous les courtisans ont de bonnes têtes à claque, et leur visage inspire autant la confiance qu’une hyène affamée. L’ensemble apporte une vitalité supplémentaire par rapport au proto. Toutefois on retrouve certains détails du proto dans l’édition finale.
Par exemple, le fait que les personnages sont toujours “décadrés” sur les cartes : ils sont coupés comme s’ils sortaient d’une porte dérobée, et leur regard bifurquent toujours vers le hors champs. Cette mise en scène se retrouve sur la couverture qui est super efficace je trouve. Un dernier détail, les meeples des joueurs : J’avais dessiné leurs silhouettes pour illustrer les pions dans mes règles de proto, mais je n’avais pas imaginé pouvoir les toucher concrètement un jour. C’est une surprise que m’avait réservé Marine, j’étais comme un fou quand j’ai découvert les petits pions en bois.
6. Enfin, as-tu un message ou un conseil pour nos lecteurs/lectrices lorsqu’ils découvriront ton jeu pour la première fois ?
V.B. : La première partie peut laisser le sentiment de s’être fait rouler dans la farine. Mais on a tôt fait de prendre sa revanche. Quoi qu’il en soit, j’encourage vraiment les joueurs à communiquer le plus possible au cours de la partie. Je trouve savoureux la possibilité de créer des alliances d’un tour, d’alerter l’un sur les manigances de l’autre, ou encore de promettre la main sur le coeur un soutien qu’on se gardera d’apporter. Je déconseille peut-être d’y jouer avec tata Jacqueline, connue pour sa susceptibilité ^^.
Merci beaucoup Vincent d’avoir pris le temps de répondre à nos questions !
Merci à toi Philippe, j’espère avoir très vite l’occasion d’abattre quelques cartes ensemble !
Encore merci beaucoup Vincent pour cet entretien et au plaisir de se retrouver autour d’une table de jeu prochainement !
Royal Secrets vous fait envie ?
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